“ Nous traversons une partie du village ; les chaumières qui avoisinent l'église forment un joli hameau qui occupe le haut d'une colline ;
nous descendons. Nos pas sont un instant arrêtés par le cours de la Saivelette, ruisseau qui active trois moulins à farine et quatre fouleries de tissus de laine. Cette commune n'offre qu'une surface inégale ; les pentes de ses coteaux sont très rapides.
La salubrité de l'air et la longévité remarquable de ses habitants lui ont fait donner le nom de Saive, qui, en Liégeois, signifie sain.”
Promenades historiques dans le Pays de Liège par le docteur Bovy (Liège 1838)
Le Hameau
Le nom « Mosty » provient probablement du latin « monasterium » et du vieux français « moutier » qui désigne l’endroit où se situait la chapelle ou l’église. Et c'est très certainement une chapelle construite ici à l'aube du XIIIe siècle qui va donner naissance à ce petit hameau. Il deviendra au fil des ans, le centre administratif et religieux du village.
Deux axes de circulation se croisent en son centre :
- Le premier portait au XIIIes. le nom de « chemin du plaiteux » dans sa traversée du village. A la fin du XVIIIes., il porte le nom de « Chemin de Lasy ». Il venait du couvent de La Xhavée (Ancienne halte sur la route de Saint-Jacques de Compostelle), traversait le hameau de la Haute-Saive, empruntait les « rue Haute » et « rue Cortil Moray » actuelles pour rejoindre le Mousset. Il remontait enfin vers le village de Tignée (édifié à quelques encablures de l'ancienne chaussée romaine reliant Visé à Trêves) par le chemin du Bois de Saive (ou de St-Mont) qui longeait le « château » de Tignée.
- Le second venait de Cheratte, via Chefneux et le hameau du Grand Moulin pour se diriger vers Bellaire (lieu de pèlerinage à partir de la fin du XVes.) et Queue-du-Bois. Ces voies demeurèrent longtemps de simples chemins dont l'assise variera souvent au fil des siècles.
Le hameau sera aussi connecté aux châteaux. Ainsi, très tôt, une première servitude seigneuriale reliera le vieux château au presbytère, en passant par le Frise. Une seconde sera tracée plus tard (XVIIIes.) au milieu des vergers montant vers Cahorday pour rejoindre le château des comtes de Méan.
Après 1279, la petite chapelle devint église paroissiale. Quelques maisons et fermes vinrent se blottir autour de celle-ci. Un premier presbytère fut édifié en contrebas, vers le château féodal, probablement au même emplacement que l'actuel (daté de la fin du XVIIes). Bien plus tard, la voie menant à la Haute-Saive accueillera l'école du village (vers 1865) puis la Maison Communale (1902).
Il est à noter que le hameau ne possédera jamais de puits public d'eau potable, ce qui freinera certainement longtemps son développement.
La Cour de justice
Aux XVe et XVIe siècles, la Cour de justice de l'ancienne seigneurie de Saive se tenait en plein air sous le vieux tilleul à côté de l'église. Elle sera déplacée au XVIIes. du temps de la famille Monsen, dans la « Cense au bois » (l'actuelle ferme Otten) à cheval sur Saive et Tignée (les deux seigneuries appartenant à l'époque à cette même famille).
Cette Cour était composée d'un mayeur (lieutenant du seigneur et officier du ministère public, révocable), de sept échevins (juges issus du peuple, désignés à vie) et d'un greffier (généralement plus instruit, il était également receveur des droits de justice), tous nommés par le seigneur qui la présidait.
La Cour se réunissait à l'occasion de plaids (= assemblées, vieux terme remontant à la période franque) qui étaient de deux types :
- Les plaids généraux (assemblée de toute la population) se tenaient trois fois par an. Tous les chefs de ménage étaient tenus d'y assister. On y donnait lecture des ordonnances du prince et du seigneur. La Cour jugeait les faits délictueux ordinaires (civils et criminels). Elle renvoyait les cas graves ou difficiles (demandait recharge) à la juridiction souveraine des échevins de Liège. Cette assemblée essentiellement démocratique débattait aussi de tout sujet lié à la bonne marche du village.
- Les plaids ordinaires (limités aux membres de la Cour), consacrés à l'examen des procès, avaient lieu tous les quinze jours.
La Cour avait aussi des fonctions administratives : enregistrement d'actes, scellage des poids et mesures ou fixation des prix de certaines denrées alimentaires de base. Elle disposait d'un sergent (ils seront deux à partir du XVIIes.) combinant les fonctions d'huissier et de garde-champêtre. Un chirurgien (médecin assermenté) était également à son service pour les autopsies lors de crimes.
Chose rare, les archives de la Cour de Saive existent encore aujourd'hui et couvrent une période allant de 1420 à 1795 (Archives de l’État à Liège).
Le vicinal
C'est en 1895 que la société des chemins de fer Vicinaux (S.N.C.V.) créée peu de temps auparavant entreprend la construction d'une ligne vicinale entre Liège et Barchon. Mise en service en 1898, elle sera ensuite prolongée jusque Fouron-le-Comte via Dalhem (1908).
Cette liaison ferrée permettra pendant de longues années d'acheminer à Liège les produits des fermes mais aussi des armuriers locaux.
L'arrêt du vicinal, construit face à l'église et non loin de la maison communale et des écoles, marquera pendant plus d'un demi-siècle le centre de gravité du village. Pour sa réalisation, on créera une nouvelle place (Mosty).