Les plus âgés s'en souviennent encore. C'était comme un bruit de motocyclette traînant une volée de casseroles. Le robot volait bien haut et s'éloignait ... Un silence ... Quelques secondes d'angoisse ... Le temps de s'écarter de la fenêtre ou plonger sous la table ... Une explosion formidable ... Un nuage de poussière ... Et on sortait aux nouvelles. C'était en 1944.
Depuis le mois de septembre, on croyait la guerre terminée. La libération s'était faite dans la joie. Et voilà que quelques mois après, ça recommençait dans les Ardennes et ici.
Ainsi, de novembre 1944 à janvier 1945, un millier de robots tombèrent sur l'agglomération liégeoise faisant plus de 1200 tués et 2000 blessés.
Le premier robot qui tomba sur Saive rasa un pâté de maisons au Champ de Pihot. C'était vers midi. Le robot pénétra par le soupirail de la cave de la maison Juvigné et fit sauter celle-ci. Il y eut une dizaine de victimes; Léon Juvigné, garde-champêtre auxiliaire et son épouse, leur fille Jeanne, 20 ans (Une excellente pianiste). Leur vieil oncle, Noël Juvigné, qui se reposait dans la mansarde. Il fut retrouvé sur un arbre dans la prairie d'en face.
Marie Jocquet, épouse de Denis Fassotte, habitant au Mosty, était « raccommodeuse » c'est-à-dire couturière à domicile chez Juvigné. La seule chose qu'on ait retrouvé d'elle, ce fut son bras avec son alliance.
Chez les voisins dans la famille de Nelly Saive, il ne resta que ses deux frères parce qu'ils étaient absents. Nelly et ses parents furent tués.
Gilbert Housset reçut les vitres de la fenêtre dans la figure. Il perdit un œil puis devint aveugle. Au cours des années, heureusement, grâce à la science, il retrouva partiellement la vue.
Quelques jours plus tard, un second V1 tombait à Parfondvaux sur la ferme Christoffe. Le fils, Pierre Christoffe, qui était professeur à Liège, sur les recommandations de sa maman, était resté chez lui à cause des bombardements.
Le robot écrasa la ferme. Une solive du plafond lui défonça le thorax. Grièvement blessé, il supplia les sauveteurs de se presser. Hélas, il était trop tard et il succomba à ses blessures.
Les robots et autres armes secrètes de Hitler n'influencèrent en rien le cours de la guerre.
Après celle-ci, les fameux Von Braun et autres savants allemands continuèrent leurs recherches au profit des alliés. Ils aboutirent aux missiles américains, soviétiques et aux sinistres skud irakiens.
Mais ceci est une autre histoire.
Robots : C’est le nom donné à Liège aux sinistres bombes volantes allemandes (V1 et V2) qui tombèrent sur toute la région jusqu'en 1945, faisant un grand nombre de victimes. Liège recevra 25% des bombes volantes tombées sur la Belgique faisant plus de 3000 victimes). Sources : L. Graillet